Toutefois, des courbatures aux cuisses, marques de la dernière rando (et de la reprise des entraînements en course à pied???!!!) font leur apparition dans la nuit et vont me faire revoir les objectifs à la baisse... Alors le Bugarach, ok, mais tranquillement!
Source : http://pyreneesmagiques.canalblog.com/archives/2012/12/01/26161034.html
La montagne et le pic de Bugarach - Vincent Basset
Vincent Basset est chercheur et enseignant en socio-anthropologie à l’Université de Perpignan. Spécialiste du Mexique et des questions portant sur le chamanisme, le tourisme, l’identité et le développement il décortique pour nous le processus de construction du mythe du site de Bugarach comme lieu d’une fin de monde. Interview.
Rue89. Comment s’est construit Bugarach ?
Vincent Basset. Dans le processus de remodelage mythologique en œuvre dans le construit imaginaire de Bugarach, différents acteurs ont participé à la création, la réinterprétation et la diffusion d’éléments mythiques, permettant ainsi la consécration de cette montagne en tant que nouveau lieu de culte.
Des chercheurs de trésors, aux prophètes mystiques, en passant par les études folkloristes et ethnologiques, toute une littérature sensationnaliste s’est développée depuis les années 70.
Plusieurs éléments mythologiques se superposent autour de Bugarach. Tout d’abord le mythe ésotérique lié au catharisme et à ses interprétations contemporaines. Puis les trésors de Rennes-le-Château (Aude), ainsi que les récits de l’abbé Boudet présentant Rennes-les-Bains comme un cromlech.
La relation entre science fiction et Bugarach est aussi une donnée à souligner, notamment à travers l’ouvrage de Jules Verne « Clovis Dardentor » où le capitaine Bugarach mène une expédition dans une île mystérieuse ressemblant étrangement au pic audois et abritant dans ses cavités une civilisation perdue.
Dans les années 70, un nouveau thème vient se mêler aux croyances liées à ces lieux : un habitant de la région, Jean de Rignies, est le premier témoin de la manifestation d’êtres extraterrestres (ovnis).
Mais ce n’est réellement qu’à partir des années 90 sous l’impulsion des publications du prophète New Age Jean D’Argoun que le tourisme spirituel va débuter dans cette région. Dans ses publications, il va mixer le mythe extraterrestre au mythe ésotérique en présentant le pic du Bugarach comme « le 7e chakra de la planète », c’est-à-dire « un terminal abritant une base extra-terrestre qui permet de se connecter à la banque de données cosmiques “ l’Akasha ”, la mémoire universelle ».
Il ne fallut pas attendre longtemps pour que certains réseaux new agers fassent correspondre la date de la fin du monde annoncée par le prophète-exégète du calendrier maya José Argüelles, le 21 décembre 2012, avec l’ouverture du vortex de Bugarach qui servirait de refuge face à cette fin apocalyptique.
Le réseau internet va diffuser ce mythe cosmogonique à tel point qu’en moins d’une année, le nombre de visiteurs se rendant au sommet du pic Bugarach est passé entre 2010 et 2011 de 10 000 à 20 000.
D’autres personnalités locales comme le maire de Bugarach Jean-Pierre Delord vont accentuer ce phénomène, en invitant la presse locale à publier des articles sciemment exagéré.
La résonance médiatique prend le pas sur le buzz du web, et le prestigieux journal New York Times relègue, le 31 janvier 2011, l’information dans la presse internationale. Les télés du monde entier se bousculent alors aux portes de ce village de 150 habitants afin de couvrir cette 185e fin du monde.
Même si le maire et son conseil municipal se disent paniqués par les éventuels débordements du 21 décembre, ils n’hésitent pas à spéculer sur l’après fin du monde au point de souhaiter faire de Bugarach « le Lourdes New Age ».
Il est intéressant d’analyser ici les différentes annonces qui se sont succédé sur la presse et Internet au sujet de Bugarach :
Première phase très euphorique où le maire prend le phénomène à la rigolade, et invite tous les curieux à venir sur place afin de « manger ensemble et se défoncer un bon coup ». Il pense même, en mars 2011, organiser un « festival de l’Utopie » ;
deuxième phase (en février 2012), il est plus question de prendre ça comme une farce, le maire se dit paniqué par les débordements possibles et les éventuels suicides collectifs ;
troisième phase (en septembre 2012), c’est la mise en place sérieuse par la préfecture d’un système de sécurisation tout autour de la montagne, avec l’annonce du filtrage du site afin de décourager les curieux.
Qui sont les touristes de Bugarach ?
Différentes populations gravitent autour de Bugarach, des chercheurs de trésor, des ufologues, et les spirituels généralement issue de la génération post-hippie. Cette population regroupe des néo-ruraux qui se sont installés principalement à Rennes les Bains et des touristes qui alimentent et diffusent les croyances et théories New Age dans le monde entier.
Certains se sont aussi installés en communauté dans des coins reculés de la vallée, ils vivent dans des tipis ou des yourtes et effectuent certains rituels néochamaniques comme la hutte de sudation. Loin des dérives sectaires, ces groupes affiliés pour certains au mouvement des indignés tentent de vivre de manière alternative en autosuffisance.
D’autres populations de passage, des participants à des stages de développement personnel, se compose à 80% de femmes, âgées généralement entre 40 et 60 ans, et occupant des postes de cadres ou de professions libérales. Comme j’ai pu l’observer au Mexique lors de mon étude sur le tourisme néochamanique, les participants à ces stages « initiatiques » se trouvent généralement dans une situation de fracture sociale (travail, famille, amis, maladie, dépendance aux drogues).
Face à la crise, on investit surnaturel ?
« Face à la crise, investissez dans le spirituel ! », a scandé Alfonso un chaman mexicain invité à Bugarach. Sur Internet, les propositions à caractère mercantile se multiplient depuis mi-novembre, ce qui choque les médias qui ont pas mal fait pour ça !
Certains proposent de recueillir et de déposer les testaments et prières de ceux qui ne peuvent se rendre sur place moyennant 60 euros par action. D’autres louent des maisons quatre personnes à Bugarach pour 1 500 euros la nuit, des parcelles de terrain à 450 euros la nuit afin d’y déposer la tente. Ou encore, la vente de produits comme une bouteille d’eau de source provenant du mont Bugarach à 15 euros.
Malgré les appels répétés de scientifiques et des représentants mayas à travers la presse, la télévision au sujet de la fausse interprétation liée à cette date du 21 décembre, la rumeur de la fin du monde court toujours.
Cette rumeur véhicule un discours de la société sur elle-même, en lien avec une vision bien judéo-chrétienne de l’Apocalypse. Cette idée de catastrophe revient dans un contexte de modernité où les sociétés sont fatiguées d’elles-mêmes. Cette perception de fin du monde est très occidentale, il n’y a qu’à entendre aujourd’hui tout les discours formatés par cette vision de catastrophe.
L’homme semble dépossédé du monde par le système économique, il n’arrive plus à s’inscrire dans un futur positif, il n’a qu’une vision catastrophiste à court terme du monde.
Source : http://rue89.nouvelobs.com/blog/oelpv/2012/12/21/linvention-de-bugarach-lourdes-new-age-229209
A un an de l'apocalypse, le pic de Bugarach fait des affaires
(De Bugarach, Aude) Bugarach, c’est un pic qui culmine à 1 231 m. Perdu dans la Haute Vallée de l’Aude, il est depuis plus d’un siècle l’objet de tous les fantasmes et croyances surnaturelles. Ses couches géologiques inversées lui...
(De Bugarach, Aude) Bugarach, c’est un pic qui culmine à 1 231 m. Perdu dans la Haute Vallée de l’Aude, il est depuis plus d’un siècle l’objet de tous les fantasmes et croyances surnaturelles.
Ses couches géologiques inversées lui donneraient des pouvoirs extraordinaires liés au magnétisme. Jules Verne s’en serait même inspiré pour écrire son « Voyage au centre de la Terre » (1864). Dans les années 60, à travers les écrits d’un auteur fasciné par l’ésotérisme, Jean d’Argoun, un nouveau mythe naît : le pic abriterait une base extraterrestre.
Mais depuis, une autre histoire, relayée sur Internet, l’a largement supplanté. Selon différentes sources, le pic de Bugarach et le village qui se situe à son pied seraient les seuls lieux sur Terre épargnés par l’apocalypse, une fin du monde qui doit intervenir le 21 décembre 2012, selon le calendrier maya.
Cette prédiction tombée du ciel il y a environ un an a focalisé tous les regards sur le petit village – moins de 200 âmes. Elle a aussi aiguisé l’appétit de certains de ses habitants qui y voient un nouveau filon à exploiter.
Un euro la carte postale avec une soucoupe
« Dans le village-même, l’affluence ne se fait pas trop ressentir », explique le maire de Bugarach, Jean-Pierre Delord.
« Mais sur le pic, elle a plus que doublé en un an. Nous avons installé un compteur là-haut : le nombre de marcheurs est passé de 10 000 à 20 000. »
Qui sont ces marcheurs ? Sait-il s’il existe des groupes sectaires dans la région ? Sur ces questions, l’élu ne semble pas trop regardant :
« Nous sommes en démocratie, ce qui implique une liberté de culte et de croyances. Moi ce qui m’importe, c’est simplement qu’il n’y ait pas d’atteinte à l’ordre public. J’en ai d’ailleurs appelé aux autorités en cas d’éventuel débordement. Si des milliers et des milliers de personnes montent au pic le 21 décembre de l’an prochain, je ne pourrai pas assurer leur sécurité. »
Si cette arrivée massive de visiteurs l’effraie un peu, le maire compte aussi en tirer profit pour sa commune.
« Je suis maire depuis trente-cinq ans et jamais Bugarach n’avait été aussi connu. Nous devons saisir ce moment pour nous faire connaître. »
Et pour bénéficier comme il se doit de cette fin du monde annoncée, rien de tel qu’exploiter directement l’événement.
« Nous vendons des cartes postales à 1 euro qui représentent le pic avec une soucoupe volante au-dessus. Nous les avons signées David Vincent [personnage principale de la série “Les Envahisseurs”, ndlr].
Je réfléchis aussi à créer un festival les années suivantes pour commémorer le 21 décembre. Ce serait un grand festival de l’utopie mais je ne sais pas encore quelle forme il prendrait. »
Une carte postale du pic de Bugarach, et sa soucoupe volante
Une carte postale du pic de Bugarach, et sa soucoupe volante - La-fin-du-monde.fr
Des devis pour construire des bunkers
Deuxième idée : en profiter pour développer l’économie locale.
« Les gens qui viennent consomment dans les restaurants ou au supermarché pas loin du village. Et puis cette publicité gratuite qui nous est faite pourrait nous permettre de mener à bien notre projet d’extension avec la création d’un éco-quartier. En étant plus connus, on pourrait faire débloquer des financements car le problème ici, comme bien souvent, c’est le fric. »
A Bugarach, certains tentent d’ailleurs d’en gagner un maximum. « En quelques mois, le prix des terrains à vendre est passé de 15 à 50 euros le mètre carré », explique Jean-Pierre Delord.
Les maisons aussi ont soudain vu leur prix exploser. Bernard Cervières travaille depuis dix ans dans le secteur de Bugarach comme agent commercial pour une grande enseigne immobilière. Et depuis que le village est au centre de toutes les attentions, y vendre des biens devient de plus en plus compliqué.
« Les propriétaires ont pensé que des illuminés seraient prêts à mettre n’importe quel prix pour venir échapper à la fin du monde. Or, ceux qui viennent voir les maisons n’ont pas les moyens de les acheter, même quand ils viennent à six ou sept couples pour faire de grandes colocations.
Par exemple, une maison que j’ai estimé à 260 000 euros est proposée à la vente à 474 000 euros. Elle va avoir du mal à partir. Les gens doublent les prix en essayant de faire l’affaire du siècle. »
Le pic de Bugarach, Aude, Languedoc-Roussillon, en 2007
Le pic de Bugarach, Aude, Languedoc-Roussillon, en 2007 - Thierry Strub/Wikimedia Commons/CC
Conséquence : les maisons ne se vendent pas et cela n’arrange personne.
« Le seul bien qui s’est vraiment vendu, c’est un domaine qui se trouve sur le pic. Il s’agit d’une exploitation agricole de 400 hectares, qui recouvre presque la moitié du pic. Elle a été vendue 1,8 million d’euros, ce qui correspondait à son estimation, à un couple de Finlandais. Ils étaient habillés normalement et voulaient reprendre le travail des anciens agriculteurs.
On a appris ensuite qu’ils avaient demandé des devis pour construire des bunkers sur le pic. Mais maintenant c’est leur terrain alors ils font ce qu’ils veulent. »
Source : http://rue89.nouvelobs.com/2011/12/24/un-de-la-fin-du-monde-bugarach-fait-des-affaires-227605
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